Ils s’appellent AJ+, NowThis ou encore France TV Zoom en France. Ils proposent, pour certains depuis 2013, des « vidéos textes » virales sur les médias sociaux. L’audience et l’engagement de leurs courtes productions font pâlir d’envie la presse et médias concurrents. AJ+ revendiquaient 2,2 milliards de vidéos vues sur Facebook en 2015. Un succès qui s’appuie sur des vidéos simples. Parfois il s’agit d’une succession de photos animées, agrémentées de textes courts bicolores et bien lisibles (de la vidéo texte). Rien de révolutionnaire en soit, mais ce format répond en tout point, dans la forme comme dans le fond, à l’écosystème des réseaux sociaux en mobilité, et en particulier à Facebook.
NowThis fait 10 millions de vues pour ce sujet sur un artiste New-Yorkais à partir d’images de son compte Instagram
Qui sont ces médias “Social First” ?
Les médias sociaux d’abord !
Au coeur de la stratégie de ces nouveaux médias : les médias sociaux. A l’image d’une politique “mobile first” pour un site internet, ces nouveaux médias parient sur une stratégie “social first” pour leur contenu. Pour être plus précis, c’est même du “social first” pour du “mobile first”. Concrètement, leur contenu est d’abord créé et optimisé pour les réseaux sociaux sur mobile. Il est ensuite éventuellement intégré sur un site web. Le nombre d’abonnées à ses pages de réseaux sociaux devient le facteur le plus important.
Que ce soit sur Facebook ou Twitter, ces marques se démultiplient : via des pages ou des comptes différents. Cela leur permet de mieux atteindre leur audience qui est mondiale. On retrouve ainsi AJ+ en 4 langues sur Facebook, mais également NowThis sur de nombreuses thématiques. Donc à chaque audience, son univers et son contenu captif. Cette politique se prolonge parfois avec du contenu dédié à chaque plate-forme : AJ+ ne publie pas le même contenu sur Instagram (photo) que sur Facebook (vidéo). On retrouve néanmoins le même contenu vidéo texte sur leurs pages Facebook et Twitter.
5 millions de vues sur cette news « internationale »- AJ+
Qui sont-ils ?
AJ+, qui est une marque à part entière sur les médias sociaux, est une émanation 100% sociale-numérique de Al Jazeera Media Network. D’abord présente sur Youtube, AJ+ a pris son envol sur Facebook. Now This, son concurrent direct, a été créé par Kenneth Lerer, cofondateur du Huffington Post. NowThis s’est développé directement sur les médias sociaux. A l’origine de ces 2 médias, on retrouve l’information. France TV Zoom n’est ni plus ni moins qu’une marque « numérique » de France Télévision: ils ont repris le nom de la défunte application éponyme pour faire de la “vidéo texte” principalement sur Facebook.
Une recette à 49 millions de vues (chaine Tasty de BuzzFeed)
Quelques médias en transition
Du coté de la presse française, certains publient sous leur propre marque du contenu « vidéo texte » véritablement “social first” en plus de leur contenus traditionnels. On peut citer L’Express ou plus timidement FranceInfo qui tentent de mettre en « video texte » de l’actu. Pas simple, pour un journaliste, de mettre en scène l’information pour faire du clic ! D’autres médias plus « pure player » et plus habitués aux médias sociaux, ont déja pris place avec des pages et du contenu dédié « réseau social ». Citons BuzzFeed France avec sa chaine Tasty Miam (recette vidéo) ou sa chaine de foot sponsorisée par Coca-Cola Football Stories.
A l’extrême, le média MinuteBuzz, qui avoisine les 8 millions de visiteurs uniques sur l’ensemble de ses plates-formes, abandonne totalement son site web au profit des médias sociaux. Si son audience provenait déjà à 75% des médias sociaux, l’équipe MinuteBuzz explique les raisons de son choix radical : d’une part la pub « display » ne rapporte plus, d’autre part sa cible millennials (génération Y) est principalement sur les médias sociaux (Facebook, Snapchat ou Snap maintenant, Twitter et Instagram).
Il reste étonnant de ne pas voir plus de chaines de télévision (hormis France Télévision avec le jeune FranceTV Zoom) occuper le terrain. Pour de la vidéo texte, elles ont la matière première vidéo, l’information et souvent les thématiques pour s’adresser à une audience précise.
Les “Social First” utilisent la puissance du contenu natif
La « vidéo texte » est une des composantes phares du succès de ces médias « social first ». En revanche, le véritable levier de croissance de l’audience tient au fait que le contenu vidéo soit natif sur Facebook. De nombreuses vidéos sans texte, avec de l’humour, de la caricature ou du DIY, rencontrent le même succès. La vidéo texte provient à l’origine du caractère informatif des médias AJ+ ou NowThis : la vidéo devait être compréhensible sans le son (voir plus bas le chapitre La place de la data Facebook).
Le contenu natif
Au coeur de toutes ces initiatives, on retrouve l’ogre Facebook et son offre plus ou moins récente de contenu natif. Ce sont les contenus qu’il héberge directement sur son service (et ses serveurs) : des articles de presse (instant article) mais également de la vidéo (live ou uploadée).
Le contenu natif est plus simple d’accès
Du point de vue de l’utilisateur Facebook, c’est du contenu très rapide à consommer au sein de l’application. Il n’y a pas besoin d’ouvrir un navigateur ou une autre application. Le temps de chargement pour les articles est nul et la pub n’y est pas intrusive. Quant à La vidéo, elle est lue directement dans Facebook, en autoplay, quand on déroule son fil d’actualité : le contenu natif est le moyen le plus simple et rapide d’accéder à son contenu !
Des éditeurs frileux
Du point de vue de l’éditeur de contenu classique, cela soulève des réticences. Bien que l’audience soit potentiellement présente, c’est le risque d’une perte de contrôle de son contenu. Mais aussi une perte de contrôle de ses lecteurs ainsi que ses recettes publicitaires. C’est en jaugeant ce risque, que se sont engouffrés ces nouveaux médias « social first ». Ils ont sans doute moins à perdre. Ils espèrent néanmoins monétiser à terme leur capacité à générer de l’audience. Si les articles natifs embarquent de la publicité et procurent du revenu direct pour l’éditeur, la vidéo sur Facebook en reste dépourvue. C’est pourtant elle qui génère le plus d’engagement et potentiellement du revenu. Une solution, vendre aux marques sa capacité virale via des contenus dédiés.
L’ogre Facebook
On retrouve ces médias « Social First » sur Youtube, Snapchat (Snap), mais aussi Twitter et Instagram (qui ont longtemps bridés leur offre en vidéo). Tous proposent un service de vidéo native au sein de leur application. Mais Facebook, en particulier pour les médias, est d’une puissance redoutable avec son bassin d’audience bien plus important et ses possibilités d’abonnement, de partage, d’engagement et de viralité sans commune mesure. Pour Facebook, le contenu natif n’est qu’un service supplémentaire qui vient s’imbriquer à la perfection dans l’énorme écosystème déjà en place.
Début 2016, Facebook revendiquait 8 milliards de vidéos vues quotidiennement au grand désarroi de l’historique plateforme de vidéo Youtube. Est-ce pour cela que Youtube s’est mis à payer ses meilleurs contributeurs ? Pour les amadouer et les garder ?
La vidéo native mise en avant
L’autre point important est la mise en avant du contenu vidéo natif par Facebook :
- Les vidéos natives se visionnent en autoplay (elle démarre donc toute seule) dans le fil d’actualité contrairement aux autres services type Youtube qui nécessite un clic. Cela favorise le visionnage (mais aussi le gonflement des statistiques par rapport aux vues réelles).
- L’algorithme “Edge Rank” de Facebook privilégie les vidéos natives. Elles se retrouvent donc plus souvent dans les fils d’actualités qu’un simple post.
En novembre 2015, 65% des vidéos postées sur Facebook était des vidéos natives. Elles bénéficiaient de 4 fois plus d’interactions que les autres vidéos. En définitive, le contenu natif est puissant car il se consulte, se partage, se commente et vit totalement à l’intérieur de l’application Facebook. Ce qui est simple et limpide à appréhender pour l’utilisateur.
Le mix gagnant à terme est donc une communauté forte (nombreuse et captive) a qui on délivre du contenu natif pertinent. A noter que les vidéos Facebook sont embeddables via un code HTML sur votre site. Comme la plupart des éléments multimédias sur la toile.
Le secret des vidéos textes natives pour les réseaux sociaux
L’émotion :
La force émotionnelle de la vidéo est au coeur de la réussite de ce type de contenu. Au delà du sujet, c’est la force d’une image, la mise en scène de son information et l’angle d’attaque qui vont toucher l’internaute. Ainsi il laissera ainsi un like, un commentaire ou partagera l’expérience vécue.
5 millions de vue pour FranceTV Zoom sur le registre de l’humour
Si la « vidéo texte » propose historiquement de la news en vidéo, de l’information, on retrouve cependant de plus en plus d’humour, de « DoItYourSelf » et de sujets froids.
La place de la data Facebook :
L’autre force des vidéos textes natives réside en un formatage directement itéré du support de diffusion et des statistiques de consultations.
- On commence par une image / un passage / un titre fort car l’on sait que la plupart des consultations se jouent sur l’attraction des premières secondes.
- Les vues sont comptabilisées à partir de 3 secondes de visionnage sur Facebook. Il faut donc les atteindre (ça peut être le seul but pour flatter les statistiques !).
- Dans le même esprit, la durée de la vidéo excède rarement la minute (voir 30 secondes selon le sujet), sous peine de voir le taux de désengagement croître sévèrement.
- On construit sa vidéo et ses textes courts pour garder en haleine l’internaute #storytelling.
- On titre et on sous-titre la vidéo pour qu’elle puisse être compréhensible sans son, et suffisamment visible sur un smartphone. En fonction du média de 50% à 90% des vidéos Facebook sont consultées sans le son. Donc pas de son, c’est la norme.
- Le format carré sera visible en plus grand sur un téléphone en mode vertical (mode normal de consultation) et donc potentiellement plus impactant. Facebook ne propose pas de format vertical comme SnapChat ou Periscope. La vidéo 16/9ème reste elle plus naturelle pour l’oeil humain ou pour une consultation sur un écran classique.
Entre l’information, le story telling et le marketing
13 millions de vues – FranceTV Zoom
Bien qu’une simple image puisse émouvoir, l’information liée à cette image n’a pas du tout le même impact. Si j’entends une news à la radio : “Un enfant battu à l’école tente de se suicider”, ou si je vois cette même news sur un post Facebook, cela restera beaucoup moins impactant que la vidéo texte (ci-dessus) démarrant automatiquement. On voit l’enfant brulé et défiguré dans une mise en scène posant la problématique. L’exemple illustre bien l’approche émotionnelle de ce type de vidéo. On ne peut pas se contenter de produire une news en vidéo sous peine d’être peu vue. L’idée est donc de trouver un angle éditorial à partir d’images exceptionnelles. Une autre approche est de trouver des images fortes pour illustrer un sujet exceptionnel.
La capacité à émouvoir/toucher l’internaute est aussi importante que la capacité à informer.
L’exemple de FranceTV Zoom est doublement intéressant puisque les vidéos informatives ont un caractère promotionnel: à partir d’un programme déjà produit de France télévision, FranceTV Zoom construit une « vidéo texte » virale et autonome. Bien que la vidéo réponde au standard du genre, elle sert à la promotion du programme TV correspondant. Mais plus qu’un simple teaser, la vidéo a les attributs d’un contenu brand content.
Vidéo texte : Les outils de création
Les outils de montage vidéo
Les logiciels de montage restent le meilleur outil pour produire ce type de contenu (Premiere CC, FCPX, etc. ) : cela permet simplement d’ajouter les textes en motion design, un logo et faire du montage qualitatif (Tutoriel video texte sur Premiere Pro CC). Cependant, il vous faut des profils type journaliste / JRI / créateur de contenu vidéo. Ou bien des monteurs en binômes avec un journaliste / rédacteur. Un infographiste averti peut faire le job si il est sensibilisé à l’efficacité, la réactivité et l’approche éditorial nécessaire.
2,7 millions de vues – vidéo que j’ai créée sur Premiere CC pour OhMyGoal
Certaines rédactions ou communiquants n’ont ni les ressources ni les moyens nécessaires. Ils peuvent se tourner vers des outils online comme Woshit (L’Express l’utilise) ou 2emotion (des frenchies) : ces solutions proposent du montage en ligne. En fonction de vos besoins, vous trouverez sur l’une ou l’autre des plates formes, des textes avec motion design, des templates prêts à l’usage, l’ajout de voix-off et l’upload de vidéo. Wochit a la particularité de proposer une banque de photos et vidéos d’actualité et d’agence de presse sans pareil.
Des vidéos, des images et peu de droits d’auteur
La matière photo ou vidéo coûte chère à produire, beaucoup plus que le montage de celle-ci. Force est de constater que de nombreuses vidéos textes utilisent, sans droits, des images récupérées ici ou là. La bienséance veut que l’on source les images que l’on utilisent mais cela ne vous protège pas. Les médias pratiquent déjà entre eux ce type d' »entente » pour des faits d’actualité chaude. Il existe de nombreux outils pour capturer un écran d’ordinateur (Camtastudio, Quicktime), celui d’un portable ou pour télécharger une vidéo sur Facebook, Youtube, Twitter ou Instagram. Pour les images, un simple clic droit, voir une capture d’écran suffisent !
Cela étant dit, l’utilisation de certains contenus, comme de grands rendez-vous sportifs ou des musiques d’artistes célèbrent peuvent vous causer des ennuis. La mise en ligne de votre vidéo texte peut être également refusée par Facebook ou Youtube, voir être acceptée sous condition !
Je reste à disposition pour vos projets professionnels (me contacter sur Linkedin)